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MalAise

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Je rentre.
Il fait nuit.
La journée de boulot m'a épuisée.
Il n'est pas tard, mais je ne tiens plus debout.
Il me tarde de pouvoir enfin m'étendre sur le lit.
Pouvoir regarder le plafond.
Dans le noir.
Les yeux perdus dans le vague.
Laisser mon esprit vagabonder.
Ne pas fixer mon attention.
Ne penser à rien.
Ou à tout.
J'arrive en vue de la maison.
Je vois du dehors, la salle à manger allumée.
Tu es donc déjà là.
Encore là.
Toujours là.
Je ne veux plus rentrer.
Je veux partir.
Ne plus te voir.
Etre seule.
Ne plus être seule.
Ne plus être avec toi.
Ne plus être seule avec toi.
J'hésite.
Et pourtant, mes pas me rapprochent de l'entrée.
C'est chez moi.
J'aime ma maison.
Je t'aime.
Je te déteste.
Je sors mes clés.
J'hésite.
Où aller?
Je mets la clé dans la serrure.
J'hésite.
Je tourne la clé.
Tu m'as entendue.
Plus d'hésitation possible.
Je t'entends bouger dans la maison.
Le verrou est libéré.
Je pousse la porte.
Le couloir s'ouvre à moi.
Vide.
Tu as éteint la salle à manger.
Tu as changé de pièce.
Comme d'habitude.
Tu es dans la chambre.
Tu sais que c'est mon refuge.
Tu refuses.
Tu veux que je t'appartienne.
Toute entière.
Complètement.
Pas de jardin secret.
Pas de moments de solitude.
Pas de calme.
Je te déteste.
Je pose les clés sur le buffet.
Je range mon sac.
J'enlève mon manteau.
Je fais tout au ralenti.
Je retarde le moment.
J'hésite.
Faire demi-tour ?
Pour aller où ?
Tu m'as piégée.
Je t'aime.
Après toutes ces années.
Que s'est-il passé?
Pourquoi ne me le dis-tu pas avec des mots ?
Pourquoi toujours des gestes?
Des gestes violents?
Je te déteste.
L'appel du sommeil est trop fort.
Ça ne va durer que dix minutes.
Après je serais tranquille.
Je m'avance.
Je me rapproche de la chambre.
Je sens ta présence électrique.
Ton impatience.
Je murmure : "Mon amour ?"
Pas de réponse.
Je t'aime.
Pourquoi restes-tu avec moi alors?
Je te déteste.
Je tourne la poignée.
Doucement.
Calmement.
Je me prépare.
Psychologiquement.
J'ouvre ma coquille pour mieux m'y enfermer.
J'ouvre la porte de la chambre.
Celle de ma coquille se referme.
Je suis totalement hermétique au monde extérieur.
Je suis bien.
Tu es là.
Debout.
Tu m'attendais.
Tu parles.
Je te vois t'agiter.
Tu cries, même.
Ca déforme ton si beau visage.
Je n'aime pas quand tu cries.
Tu le sais.
Mais ça te fait crier encore plus fort si je te le dis.
Alors je ne dis rien.
Je reste dans ma coquille.
Spectatrice hors du jeu.
Tu as déjà détaché ta ceinture.
Ta belle ceinture.
Celle que je t'ai offerte il y a huit ans de ça.
Tu l'aimes aussi cette ceinture.
Avec sa grosse boucle en argent.
Lourde.
Dure.
Tu brandis la ceinture au dessus de ta tête.
Tu l'abats violemment sur mon corps.
Je ne sens rien.
Je ne fais rien.
Je me recroqueville un peu plus dans ma coquille.
Et tu recommences.
Encore.
Encore.
Et encore.
Je vois du rouge devant mes yeux.
Du sang.
Qui coule.
De ma tête.
Ma coquille s'ébrèche.
Tu continues.
Toi aussi tu es rouge.
Mais tu ne saignes pas.
Tu es rouge de colère.
Pourquoi ?
Que t'ai-je fais ?
Tu ne me l'as jamais dit.
Tu ne me dis jamais rien.
Tu cries.
Et je n'aime pas ça.
Tu n'es plus toi.
Pourquoi as-tu tellement changé?
Les coups pleuvent.
Je suis par terre.
En boule.
Tu continues.
Inlassablement.
Toujours plus fort.
Je suis par terre.
Ma coquille est cassée.
Eventrée.
Mon corps est cassé.
Tu cries toujours.
Mais moins fort.
Je ne bouge plus.
Je ne pleure pas.
Je ne sens rien.
Je t'entends ne plus rien dire.
Je t'entends respirer.
J'entends la question dans ta tête : "Mon Dieu, qu'est-ce que j'ai fait ?"
Je sens la panique en toi.
L'incompréhension.
C'est donc ça : toi non plus tu ne sais pas pourquoi tu fais ça.
Trop tard.
Il est l'heure.
Je pars.
Je te quitte mon amour.
Je t'aime.

Créé le 10/06/04.
Inspiré par la Chanson "Denial" de Kari Rueslåtten

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