EchoSukien

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Echo Sukien



Un nouveau dimanche ensoleillé commençait pour les six compagnons du groupe... Un groupe de musique pas comme les autres, une bande d'amis pas comme les autres. Ils s'appelaient eux-mêmes les Sukiens, en vertu d'une histoire de science-fiction épique écrite par Donovan, un des membres de leur groupe. Donovan avait écrit l'histoire en amateur, mais le nom était resté. L'histoire en question racontait les aventures haletantes de six explorateurs de l'impossible : trois filles et trois garçons, tous dans la fin de leur adolescence, aux pouvoirs formidables et à l'entente proverbiale.
Evidemment, les six personnages de l'histoire avaient été tirés de la réalité de la vie de Donovan. Il avait même été jusqu'à garder les noms de ses amis dans son récit...
Les Sukiens, plus qu'humains et autre chose encore...

Venait d'abord Konrad, le leader charismatique de leur groupe de potes. Brun, cheveux courts, élancé et aux traits fins et discrets cachant une intelligence vive et un caractère qu'on aurait qualifié de "féroce".
Ensuite Baine, une belle et terrible brune aux cheveux longs couleur jais, dont l'humeur froide et distante contrastait avec la peau pâle d'un ange. Parmi ses amis, son attitude passait dans l'autre extrême, où sa chaleur humaine et son esprit fêtard avait permis de nouer une relation amoureuse étrange entre elle et Konrad.
Derrière elle arrivait directement Chami, au comportement brusque et grognon d'une jeune femme aux charmes certains mais à l'approche cavalière des choses. Elle aussi entretenait quelques relations avec Konrad, et était assez proche de Baine pour que cela se fasse sans aucun accroc ni même l'idée d'une jalousie entre elles deux.
Chami et Baine, le jour et la nuit. L'une grande et brune, l'autre petite et blonde. L'une aux mouvements lancinants et élégants, l'autre à l'allure agressive et aguichante. Deux faces d'une même médaille ?
Quatrième compagnon : Donovan. Grand, toujours à l'aise et l'ami loyal et sympathique par excellence. Dans un groupe aussi fermé que celui des Sukiens, "Danny" jouait la figure de proue, celui sur qui on pourra toujours compter, celui qui a toujours fait partie du groupe.
Vient ensuite la soeur de Donovan : Jenialone. "Jenny" pour les intimes, au regard de braise et aux silences bizarres. Quand elle ne parlait pas, c'était à coup sûr signe qu'elle allait se mettre à grimper aux arbres ou à accoster les passants pour savoir ce qu'ils pensaient d'héberger son frère pour quelques jours, le temps qu'elle lui trouve un hôpital pour soigner sa psychopathie chronique. Autant dire que Donovan a eu bien souvent du mal à convaincre les gens qu'il était parfaitement sain d'esprit et que sa soeur n'était qu'une incorrigible taquine qui aimait faire des blagues douteuses.
Dernier mais pas le moindre : Winston Burdeaux. Un colosse noir de peau, derrière le sourire duquel Jenny avait souvent vite fait de se cacher. Laisser Burdeaux et Jenny seuls entre eux était sans doute la plus sage et la plus irresponsable décision qu'on puisse prendre, selon l'humeur de ces deux acolytes experts dans le chamboulement de vie intempestif.
Les six compagnons avaient une confiance totale et absolue en eux-mêmes et en leurs compagnons. Un groupe plus soudé et organisé qu'on ne pourrait jamais l'être. Ils partageaient une vision du monde unique, faite d'un mélange de souffrances muettes, d'expériences enrichissantes et d'un accomplissement personnel poussé. Chacun d'eux était furieusement solitaire et indépendant, et souffrait constamment de vivre en ce bas-monde sans pour autant en connaître la raison. De ce fait et par leur acceptation mutuelle, ils formaient une bande d'amis d'une unité et d'une loyauté à nulle autre pareille.

Qui aurait pu croire, eux les premiers, que les récits de Donovan avaient été leur quotidien dans des vies passées ou à venir ? Qui aurait pu penser que les Sukiens finissaient toujours par se réunir pour lutter ensemble, quels que soient l'espace et le temps qui les séparent ? Dans chaque dimension du multivers, Konrad, Baine, Chami, Donovan, Jenny et Burdeaux se sentent irrésistiblement attirés les uns par les autres. Un destin plus vieux que l'humanité à forgé leurs âmes dans un seul moule, dans un maelström de douleur, avant de la fragmenter et de l'éparpiller à tout vent. Il existe d'autres Sukiens qui attendent encore de comprendre ce qui les pousse à chercher leurs semblables, à chercher ce qui les ronge au fond de leur esprit forgé pour le souffle des batailles et des guerres...
Chaque Sukien porte l'étincelle du Pouvoir en lui. Un potentiel infini qui n'attend qu'un déclencheur pour se réveiller...

Mais notre groupe actuel ignore encore l'étendue de tout ceci, tout en étant visiblement au-dessus du commun des mortels. Les Sukiens de notre Donovan traversent la vie comme une aiguille effilée, et se reposent pour l'heure dans "leur" coin, au fond des bois de Martreuil, pas très loin de chez Danny et Jenny, et à moins d'une demi heure de route de chez Konrad et les autres.
Ils marchent pour aller pique-niquer, profitant avec une joie paisible et consommée du simple fait d'être là et d'être ensemble...

- Moi, ce que j'en dis, commença Baine avec un petit sourire à l'adresse de Donovan, c'est qu'on aurait du prendre des allumettes et se faire des merguez au feu de bois...
- Oh arrête, dit, un peu exaspéré, Donovan, qui voyait bien que Baine cherchait encore à le taquiner. Des tranches de jambon ça fera largement l'affaire.
- Ouais, d'accord, mais bon, ça tient pas dans le ventre ces choses-là, renchérit Chami.
Donovan lui fonça dessus, l'attrapa par la taille et tous les deux atterrirent dans un tas de feuilles sur le bord du chemin boisé.
Chami reprit l'avantage en bourrant le visage du jeune homme d'un paquet de feuilles mortes à moitié sale. Tandis que les deux compères poussaient force cris et jérémiades tout en continuant à se chamailler parmi la verdure, Konrad et les autres continuaient à avancer négligemment :
- On se pose de quel côté ? Demanda Konrad.
- Arrête ça ou je t'enterre vivant ! Ponctua Chami.
- On va au bord de la rivière ? Hasarda Burdeaux.
- Tu vas pourrir en enfer, suppôt de Satan ! Prononça comme une sentence Danny.
- Moui, y'a une petite clairière qui ferait sûrement l'affaire, un peu ombrée, confirma Jenny.
- Passe devant, démon du 5ème cercle ! Répondit Chami à un Donovan méconnaissable sous le tas d'humus.
- Soit, en avant toute, mauvaise troupe, conclu Baine.

Ils continuèrent à avancer tranquillement, jusqu'au moment où on n'entendit plus que le bruit du vent dans les arbres et les petits pépiements d'oiseaux. Avant que quiconque puisse se demander comment cela pouvait être aussi silencieux tout à coup, Donovan, encore tout décoré de feuilles, passa au milieu de la bande en riant aux éclats, et se jeta sur un arbre au devant, attrapant la première branche d'un geste souple. Il disparu d'une petite acrobatie dans les branchages.
Chami passa à son tour, riant aussi, et, se faufilant dans un arbre à son tour, cria à l'attention des autres :
- Le dernier dans la clairière est un raté d'la vie !!
Dans ce coin de la forêt, et jusqu'au bord de la rivière, les arbres étaient touffus et nombreux, si bien qu'en une poignée de secondes, Donovan fut presque hors de vue, suivi de près par Chami.
-Ah ouais, vous croyez ça ?!? Leur cria Konrad, et il se lança à leur poursuite.

Et bientôt tout le groupe suivit, rivalisant de prouesses physiques tout en s'amusant à sauter de chêne en chêne, de branche en branche, se salissant en deux temps trois mouvements tout en bondissant comme des singes et agitant la cime des plus petits arbrisseaux. N'importe quel être humain en serait resté bouche bée, mais eux continuaient comme si de rien était...
La course-poursuite tourna vite à la partie de cache-cache, tandis que chacun passait hors de vue des autres et se laissait enrober d'un voile de silence. Leur discrétion était ponctuée par le bruissement imperceptible des branches. De temps à autre, un des Sukiens "tombait" sur un autre, le surprenant et l'envoyant à terre dans un grand bruit et à grands renforts de rires enfantins.

Arrivant à peine essoufflés dans la clairière, Burdeaux, Konrad et Jenny bondirent des dernières branches sûres pour atterrir comme ils pouvaient dans l'herbe haute. Vinrent ensuite Baine puis Chami.
- Alors ? C'est Danny le dernier ? Demanda en souriant Konrad.
- On dirait bien, renchérit Burdeaux en souriant jusqu'aux oreilles.
Donovan arriva, plein de boue et l'air bougon. Chami éclata de rire.
- C'est pas bien de charrier ce pauvre Danny, Chami, tu devrais arrêter de lui mettre la tête dans tous les bourbiers qui passent.
- Hein ?! Mais c'est pas moi !
Baine eu du mal à ne pas pouffer de rire, et commença à siffloter d'un air faussement innocent.
Ils s'arrêtèrent avec un peu de mal, et installèrent bien tranquillement le repas tout en allant de temps en temps barboter dans l'eau jusqu'aux chevilles.
Ils commencèrent le repas, où plutôt firent une première pause casse-croûte, Danny en profitant pour se rincer un brin.
Jenny chercha qui manquait à l'appel des sandwichs, et remarqua Konrad, plus loin dans la clairière, le regard braqué vers le ciel comme s'il observait quelque chose.
- Konrad ? Appela Chami.
En fait, il semblait plus à l'écoute de quelque chose...
- Konrad ? Réitéra la jeune fille blonde aux grands yeux marrons.
Konrad ne répondit pas, leur tournant toujours le dos.
L'ambiance baissa d'un cran quand ses compagnons le rejoignirent et qu'ils le virent toujours aussi concentré. Ils tentèrent bien de comprendre ce qui pouvait attirer son attention ainsi, mais rien dans le ciel, ni aucun bruit particulier ne vint troubler la quiétude de la prairie...
Baine le frôla d'une caresse, et lui murmura à l'oreille :
- Konrad... qu'y a-t-il ?
Tous se regardèrent, car chacun savait que l'intuition de Konrad avait une propension assez unique à se vérifier. Que pouvait-il bien ressentir de si étrange pour qu'il soit ainsi concentré ?
- Parle-moi, Konrad...
- Attendez... il y a... il y a quelque chose d'étrange...dans l'air...non : partout...
- ...
- C'est très diffus, reprit Konrad, les sourcils froncés... j'ignore ce que c'est...

Tout à coup, ils le sentirent aussi. Comme l'air se chargeant d'électricité avant un orage, comme une impression indéfinissable.
Une bande de jeunes gens, l'air absent, au beau milieu d'une forêt. Cela aurait pu paraître étrange à n'importe qui, mais eux avaient appris à vivre avec ça, et plus encore : à écouter leur instinct.
Cet instinct qui leur battait de plus en plus les tempes en cet instant...
- Mais...qu'est-ce que c'est, bon dieu ? Demanda Chami.
- Quoi que ce soit, ça vient de loin, de très loin, je le sens... dit Burdeaux.
- Je le sens aussi, approuva Konrad. Ca a quelque chose...d'ancestral et d'astral à la fois...
Ce quelque chose était un sixième sens. Il leur carillonnait aux oreilles, mais comment auraient-ils pu comprendre ? Et même s'ils avaient compris de quoi il s'agissait, qu'auraient-ils bien pu y faire ?

"Une vague venait du fin fond des dimensions...comme un raz de marée emportant tout sur son passage... Une onde de choc intarissable, irrépressible... enclenchée par hasard d'un autre monde, dans un autre temps...
Cela arrivait chez les Sukiens, dans leur galaxie..."


Bien qu'eux-mêmes l'ignorent encore, les Sukiens ont un pouvoir sur toute la réalité des choses. Leur âme est la matière la plus indestructible qui soit dans toute la Création. Ils possèdent en eux le savoir pour utiliser cette puissance tellement néfaste.
Sans même en avoir conscience, ils tentent déjà de repousser cette vague qui va s'abattre sur leur multivers. Ils scrutent l'atmosphère, dans l'attente d'on ne sait quoi.
Sous l'effort qu'ils fournissent sans même s'en rendre compte, leur cerveau commence à s'embrumer et à s'échauffer, leur faisant perdre peu à peu le contrôle de leur corps.
Ici, le bras de Donovan tressaute succinctement, mais personne ne le voit.
Là, le nez de Baine commence à saigner, mais personne ne s'en aperçoit.
A côté, les yeux de Konrad s'injectent peu à peu de sang, lui donnant un regard rouge profond, mais personne ne peut l'imaginer.
Tous les Sukiens près de la rivière restent les yeux braqués sur le ciel, jouant le rôle que leur a confié l'univers.

Mais la vague continue d'avancer, et transperce le voile des dimensions pour conquérir au nom du Bien Suprême, système après système, et ce à toutes les époques temporelles...
Le potentiel destructeur engendré par sa présence non désirée commence à s'accroître exponentiellement. La Puissance impalpable et infinie des Sukiens érige une barrière de probabilité contre la vague venue d'ailleurs. La tension s'accumule entre la barrière spirituelle sukienne et la vague envahissante.

Bientôt, la vague sera sur la Terre des Sukiens, c'est écrit. Des forces stellaires bien plus grandes que le cosmos bougent dans l'ombre, et ce ne sont pas six humains de naissance, tous Sukiens soient-ils, qui anéantiront un Bien qui a pris possession de la force de cent mille mondes !
La vague mentale arrive sur Terre, et les Sukiens commencent à percevoir son omniprésence. Avant que le "mot" ne se fasse jour dans leur esprit, le ressac du temps et de l'espace leur laisse entrevoir leur futur immédiat.
Une seconde et demi avant que la vague les dépasse, la barrière sukienne cède, et contre-attaque immédiatement, maintenant que la menace est présente dans l'esprit conscient des Sukiens.
Tant que la menace restait invisible et incompréhensible, les Sukiens ne pouvaient déployer toutes leurs forces.
A une seconde et demi de la Fin, cela devient possible...

Devant les six jeunes gens, la clairière explose littéralement, projetant un feu bleu nimbé de pourpre à trois cent kilomètres à la ronde. Ils sont propulsés en un instant à des centaines de mètres de hauteur, sous l'afflux massif de puissance brute. Ils sont pulvérisés dans la déflagration, mais ne meurent pas avant de voir leur "oeuvre". Le cerveau humain a beau pouvoir passer de vie à trépas en une fraction de seconde, cette fraction reste quand même un temps extrêmement long et divisible à l'infini en minuscules fragments de temps...
Konrad et ses amis ont donc le temps de voir la Terre de très haut, et sous un curieux jour, avant que l'immédiat effet du "mot" les enrobe, les protégeant d'une mort plus que certaine...

Xinoflu...


Ils se mettent à flotter, leurs coeurs, leurs corps et leurs esprits adoucis par la sérénité ultime du Xinoflu...
La vague continue sa course...



Par Skatlan.



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